samedi 13 février 2010

Tribulations fictives.

Note : je connais le sens de chacun des mots que j'emploie ; si mes titres n'ont aucun rapport avec les textes qu'ils précèdent, c'est simplement parce que moi j'en vois un. J'ai l'esprit mal fichu, hein ?

J'a également conscience de la longueur des pâtés que je ponds, seulement, voyez-vous chers amis, si j'écris, c'est pour moi. Obtenir un avis me fait plaisir, un lecteur m'honore, mais que vous passiez votre chemin parce que les mots vous effraient.. je m'en lustre l'asperge.


Maudit ennui qui le tourmentait, le malmenait. L'heure tournait, et lui ne savait plus où poser son regard ; en quatre heures, il avait largement eu le temps d'étudier les moindres recoins de sa chambre. Petite pièce, sombre, sobrement meublée ; un confort spartiate mais amplement suffisant. Une planche sur deux tréteaux faisant office de bureau, une armoire bancale, un matelas usé, voilà ce qui peuplait l'endroit. A coté du lit trônait fièrement le seul représentant de l'ère technologique dans laquelle le monde avait plongé il y a quelques années : un radio-réveil poussiéreux, affichant 04:13 en grands caractères rouges, lumineux. Il faut dire que cette.. chose apportait bien plus de lumière que l'unique "lampe" de la pièce, une simple ampoule blanche au bord de l'agonie : chaque étincelle semblait être la dernière ; elle grésillait continuellement, troublant le calme apparent.

Le jeune homme se redressa, s'extirpant de sa paillasse à grand peine : son dos le faisait souffrir, d'autant plus qu'il avait établi son nid au niveau du sol. La porte grinça. Un peu d'huile sur les gonds ne serait pas du luxe, pensa-t-il. Couloir sombre. Une guitare électrique contre le mur. Ah, cette gratte... Il avait fallu choisir entre elle ou une nouvelle télévision ; la décision avait vite été prise. Le plus discrètement possible, il se fondit dans l'obscurité ambiante et se dirigea vers la cuisine. Il y avait laissé son ordinateur, allumé, pour ne pas interrompre le téléchargement (il)légal du Cercle. Le garçon posa une main hésitante sur la poignée cassée du réfrigérateur : alcool ou soda ? Alcool. Bière ou Vodka ? Vodka. Savaient-ils seulement à quel point il préférait la compagnie d'une de ces bouteilles à celle de trois de ses 'amis' ? Vodka. Pas la peine de rester planté devant le grand cercueil de glace. Eh bien, oui, on y met bien de la vache morte, là-dedans.

Une fois devant le placard qui tenait lieu de bar, il s'assit à même le sol, se plongeant dans une profonde réflexion. Les cigarettes étaient un tout petit peu trop loin sur sa gauche : tant pis, il s'en passerait. Une, deux gorgées. A la quatrième, il sentit sa gorge se réchauffer. A la onzième, il cessa de compter. Puis il posa la bouteille à côté de lui et attendit la chaleur qui ne manquerait pas d'envahir ses jambes. Joli coeur, tu te meurs en cette journée d'hiver, souris, souris comme hier, soleil de mes rêves...

Il se rappelait les paroles de son professeur de latin. La vengeance n'apporte que la vengeance, et la haine n'engendre que la haine. Rien de bon ne ressort de cela ; la mort entraîne la mort. C'est un cercle vicieux, un serpent qui se mord la queue. Oh, on peut dire que maintenant... tous ces mots prenaient leur sens. Elle était partie, laissant un vide derrière elle. Non, laissant le néant, néant qui avait pris la forme d'une douleur. Elle était partie, alors lui aussi, il avait décidé de la rejoindre. Et lui, insignifiante petite personne assise dans un petit salon, dans un petit appartement, dans un petit immeuble d'une petite ville, d'un pays petit, oui, lui, eh bien.. il était seul. Seul et découragé : preuve lui avait été donnée que l'espoir n'est pas. Qui sont-ils, ces inconnus, pour oser dire que tout ira mieux un jour ? Qui était-il, lui, jeune imbécile, pour promettre que tout peut s'arranger, pour y croire vraiment ? La Terre n'était-elle donc peuplée que d'hypocrites ne faisant que se voiler la face, fermant les yeux devant la réalité de l'ennui, de la souffrance, de la culpabilité ?

Il avait tué quelqu'un. Il n'avait pas quitté une de ces innombrables nanas qui se considéraient comme irrésistibles, il ne s'était pas fait plaquer par l'amour de sa vie pour en arriver là, non ; lui, il avait tué quelqu'un. Alors bien sûr, il ne lui avait pas collé un Beretta contre la tempe, mais ç'eût été la même chose. Il avait donné un flingue à un gosse. Il avait donné les clefs du paradis à un dépressif. La bêtise n'avait-elle donc pas de limite ? Il était de notoriété publique qu'il n'était pas un fêtard, qu'il ne respirait pas la joie de vivre, qu'il était mal. Cette histoire n'avait en rien arrangé les choses, ça, il en était sûr. La cupabilité le rongeait, et c'est pour cela qu'il s'était une fois encore levé, en pleine nuit. Le sommeil ne faisait plus partie de ses activités ; les rares fois où il le trouvait, c'était grâce aux hypnotiques, ces dieux tout puissants que le médecin lui avait prescrit pour "surmonter avec succès la dure épreuve psychologique qui lui était imposée".

Culpablité destructrice, qui le faisait descendre chaque jour un peu plus bas, lui permettant de battre des records sur l'échelle du pitoyable. Son cerveau tournait au ralenti, tout comme la pièce autour de lui, d'ailleurs, qui se mouvait avec une folle élégance. En temps normal, cela lui aurait sans doute tiré un sourire, mais cette fois, le degré de misère qu'il avait atteint l'affligeait plus qu'autre chose, et c'est en baissant les yeux, comme sous le poids de la honte qu'il cachait, qu'il s'endormit d'un sommeil sans rêves.



Hotel California - The Eagles

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